Raclure de balais de chiottes

4 décembre 2023 – 1000 mots

Mélenchon, ce criminel notoire…


L’homme à abattre est donc Mélenchon. Son dernier crime ? N’avoir pas condamné le Hamas. Tout le monde a condamné le Hamas pour le massacre barbare du 7 octobre en Israël, tout le monde mais pas Mélenchon. C’est un signe. Que dis-je, un signe, la preuve lumineuse qu’il est du côté des massacreurs, et qu’il se livre à une abjecte entreprise de récupération de la « racaille pro-islamiste ». Une « raclure de balais de chiottes », ce type, il faudrait le « déchoir de tout » disent certains, même Lordon l’a critiqué sur son blog :

« La FI n’a pas commis les erreurs dont on l’accuse. Mais elle en a commis. Une – et de taille. Dans un événement de cette sorte, on ne se rend pas directement à l’analyse sans avoir d’abord dit l’effroi, la stupeur et l’abomination. »

Le coupable s’y étant refusé, il mérite le bannissement d’une communauté humaine qui ne saurait admettre dans ses rangs une « raclure de balais de chiottes ». Je suis bien d’accord que la compassion doit aller aux victimes en priorité number one, et que l’on a tous le devoir moral de condamner le Hamas. Mélenchon a donc failli à son devoir, il n’a pas montré sa patte blanche de bon citoyen, c’est une faute tactique majeure, mais est-ce une raison suffisante pour le condamner à son tour ? Mérite-t-il, comme le signifie sans ambiguïté l’expression « raclure de balais de chiottes », d’être condamné pour n’avoir pas condamné ce qu’il devait condamner ? Et si oui, mérite-t-il de l’être en des termes qui le dépeignent ainsi ? Ça fait bizarre de voir d’honorables personnes, sûres d’être du bon côté quand elles pourfendent racistes, fachos et extrémistes, de les voir employer le même langage déshumanisant que leurs (prétendus?) adversaires.

En ce qui me concerne, je refuse catégoriquement de joindre ma voix à la meute de loups qui condamne dans un même mouvement et le Hamas et ses sympathisants supposés. Leur manque de sélectivité et leur empressement les discréditent, ils font de Mélenchon un punching-ball sans mesurer que toute la presse, tous les médias font comme eux, avec pour conséquence de discréditer la seule voix dissidente à témoigner du fait que nous sommes encore en démocratie, et qu’il y a encore une opposition de gauche, c’est-à-dire une vraie opposition, pas celle du RN ni des principaux partis gauchistes, PC, PS, EELV, tous « neutralisés » selon Lordon.

Je concède volontiers, qu’à draguer la « racaille pro-islamiste », Mélenchon ne se montre pas très inspiré, c’est le moins qu’on puisse dire, et qu’il aurait pu avoir la décence d’attendre au moins 24 heures avant de twitter, 24 heures ce n’est pas beaucoup demander, mais où est le préjudice ? Qu’on ne veuille pas le suivre et encore moins voter pour lui, je comprends, qu’on le condamne comme un criminel, je ne comprends plus. Le seul préjudice est pour la gauche et la NUPES dont se fichent royalement ceux qui le condamnent, et de toute façon Méluche fait le bonheur des merdias de droite qui jubilent. Parce qu’on aime, on adore avoir quelqu’un à condamner dans ce pays ! C’est l’occasion de sortir le grand pavois et d’afficher sa supériorité morale à être dans le bon camp.

Perso, je n’ai pas du tout la certitude d’être dans le bon camp, c’est pourquoi je refuse toutes condamnations morales avec moult raisons à la clef :

  • Elles masquent le plus souvent des condamnations idéologiques, la morale n’étant que ripolinage sur des « intérêts bien compris ». Dans le cas du 7 octobre, la condamnation du Hamas relève vraiment de la morale, je suis d’accord, mais pas celle de Mélenchon-qui-n’a-pas-condamné-le-Hamas. Il n’y a pas de faute morale à ne pas condamner explicitement mais verbalement un crime, je ne reconnais que les condamnations judiciaires. Le reste c’est grégarisme et lutte de pouvoirs à l’avantage de ceux qui condamnent.
  • Elles doivent être tranchantes et tranchées, elles interdisent les oui mais dont je suis friand, et participent au mouvement actuel de fragmentation, polarisation, extrémisation, opposition front contre front, toutes choses qui se matérialisent en ce moment par des milliers de kilomètres de murs sur les frontières.
  • Elles n’empêchent pas le Mal d’exister ni de proliférer. Je pense même qu’elles le favorisent en prétendant lutter contre, parce qu’elles font barrage au dialogue en coupant les ponts. Qui a envie de discuter avec une « raclure de balais de chiottes » ?
  • Elles sont l’arme préférentielle du système pour mener les masses par le bout du nez, car ce système a besoin d’ennemis immoraux pour se légitimer, l’onction du pape n’existant plus. En réalité, le système capitaliste est moral autant que possible avec ses citoyens, (ses insiders), et complètement immoral à l’extérieur, c’est le clivage de base du colonialisme, qui se montre de façon caricaturale et cruelle dans le conflit israélo-palestinien.
  • Elles sont le procédé commun au racisme et aux mouvements sociaux comme la cancel culture, le harcèlement scolaire ou cybernétique. C’est pas le genre de modèle que j’affectionne.
  • Elles servent à exclure et éliminer des adversaires. Elles sont la première marche d’escaliers conduisant à des échafauds.

L’image d’illustration vient d’un site qui se situe, selon Wikipédia, « entre la « droite de la droite » et l’extrême droite ». C’est pas ma tasse de thé, mais on peut lire la page, ça permet de se faire une idée sur un langage qui manie les mots comme un islamiste son sabre.


Le sujet concernant Israël et la religion, on peut lire aussi sur ce blog :

  • Les dés sont pipés : où il apparaît que les monothéismes servent de réservoir à la violence, (au nom du sacré), et à en déléguer l’usage aux fidèles (oct. 2018)
  • Information et indifférence : indifférence de l’opinion israélienne envers les Palestiniens. Je ne juge pas, nous-mêmes sommes indifférents à une foultitude de malheurs. (oct. 2018)
  • Sang et champagne : billet d’humeur suite au transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem. (mai 2018)

2 commentaires sur “Raclure de balais de chiottes

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    1. Je souscris à cette analyse, en particulier à toutes les nuances des « oui mais ». J’ai relu  » informations et indifférence » et  » Sang et champagne », écrits il y a déjà 5 ans. L’injustice d’Israël envers la Palestine dure depuis 75 ans, et le monde entier pleure à chaudes larmes l’attaque du 7 octobre. Certes! et je pleure aussi. Mais depuis, je n’ai jamais entendu dans aucun media le vocable  » terrorisme d’Etat » pour qualifier le terrorisme d’Israël dans sa réaction meurtrière démesurée dans l’enclave de Gaza, qui est soumise à un blocus total depuis 15 ans . Comme le dit bien l’historienne Sophie Bessis dans le Monde diplomatique de décembre 2023 :  » l’instrumentalisation de la Shoah a atteint des sommets. Il n’est pas une déclaration israélienne qui n’utilise le terme  » pogrom » … Personne parmi les instances du judaïsme européen ou américain ne s’est élevé contre cette instrumentalisation du martyre passé des juifs , confinant à l’indécence … »
      20 000 morts palestiniens civils versus 1200 morts israéliens, c’est normal , il faut éradiquer, c’est le leitmotiv ! … écoles, hôpitaux, mosquées sont éclatés, peu importe, il faut éradiquer ! 2,3 millions de gazaouis en état de famine ( planifiée par Israël ), parqués à droite ou à gauche, à l’abri nulle part , peu importe , il faut éradiquer ! comme on éradique une maladie ! …

      JNB

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